Lepidochelys kempii (Garman, 1880)

Tortue de Kemp

En février 1995, Monsieur Marcel Héraudeau découvrait une petite tortue vivante échouée vivante sur le rivage de sa commune, à Ars-en-Ré. Il était loin de soupçonner qu’il venait de recueillir l’espèce de tortue marine la plus fragile de la planète, la tortue de Kemp (Garman, 1880). Elle mesurait 297 mm pour un poids de 3,22 kg. Il prévenait l’Aquarium de La Rochelle, qui l’a pris en soin dans les locaux tous neufs de son Centre d’Études et de Soins des Tortues Marines [1] mais elle ne devait pas survivre.

Lepidochelys kempii (Garman, 1880)
Lepidochelys kempii (Garman, 1880)
Crédits : Ré Nature Environnement

La tortue de Kemp doit son nom à son découvreur, un pêcheur de Floride, en 1880, et son nom scientifique est Lepidochelys kempii .
On pourrait en faire un symbole de la fragilité de nos océans, car sa population est estimée depuis les années 80 à quelques centaines, pour l’océan Atlantique, le seul océan où elle peut être observée. Les tortues femelles en âge de pondre, viennent sur une seule plage dans le Golfe du Mexique, de jour, et toutes en même temps, en arribada [2]. La femelle tortue pond ainsi en deux ou trois fois, 50 à 180 œufs dans un nid profond de 40 à 50 cm. Cette apparition de plus de 100 000 individus sur un même endroit donnait l’impression d’une abondance sans limite dans les années 1940. Capturée pour la consommation humaine, l’espèce a frôlé l’extinction, mais ce sont les captures accidentelles dans les engins de pêche aux poissons et aux crevettes qui ont encore actuellement le plus d’impact sur les populations en cours de reconstitution depuis les années 1970. De plus, le Golfe du Mexique a connu une pollution gigantesque par hydrocarbures dont les effets ont été désastreux sur les populations juvéniles de l’espèce qui se nourrit de petits poissons, mollusques, crustacés sur les petits fonds situés dans la zone de déversement.

Lepidochelys kempii
Lepidochelys kempii
Crédits : Grégory Ziebacz

En décembre 1999, une seconde petite tortue, 4,60 kg pour une longueur de carapace de 330 mm, a été découverte morte sur le rivage de l’Ile de Ré. Elle a été amenée au Centre d’Études et de Soins de l’Aquarium de La Rochelle où elle a été examinée. Les tortues de Kemp adultes ont la taille la plus modeste des tortues marines, avec 60-70cm de longueur de carapace pour un poids de 30-50 kg. Cette carapace est plutôt courte mais large, donnant à l’ensemble une forme arrondie, comparé à une tortue caouane, dont la carapace est nettement ovale. La couleur de la tortue tirant sur le gris, sert d’indication à l’identification, mais c’est une autre particularité qui la différencie, sur son plastron ventral, on peut découvrir, mais avec beaucoup d’attention des pores appelés pores de Ratke sur quatre écailles.
Ces pores sont une énigme de la science, espérons qu’elle sera résolue avant la disparition totale de l’espèce.

Lepidochelys kempii (Garman, 1880)
Lepidochelys kempii (Garman, 1880)
Crédits : Grégory Ziebacz

[1C.E.S.T.M.
Depuis le début des années 1990, l’Aquarium a développé un centre de soins et d’études des tortues marines. Centre unique en France, qui a orienté ses recherches sur les jeunes tortues retrouvées échouées sur le littoral dont le parcours de vie n’était pas étudié. Même si peu connu que cette période de leur jeune vie était appelé « Les années perdues ». Maintenant, grâce aux progrès de la technologie, leurs parcours peuvent être suivi à l’aide de balises satellites.
En 2014, les chercheurs du CESTM, comme les années précédentes ont observé les quatre espèces de tortues marines sur la façade Manche-Atlantique, dont les échouages sont en augmentation depuis 2010, dont 8 échouages de tortues de Kemp, soit l’équivalent des échouages de tortues luth, autre espèce en danger d’extinction.
En 2015, se sont 35 échouages de tortues marines que le centre a dû gérer sur la façade Manche-Atlantique. Douze tortues caouanes et une tortue verte sont actuellement en soins, et pourront être vus le XX août en matinée, plage de la Conche des Baleines à Saint-Clément-des-Baleines (17) lors d’une opération publique de remise en liberté. Certaines seront équipées de balises et le trajet nautique des animaux s’affichera sur le site de L’Aquarium de La Rochelle à la rubrique « suivons les tortues ».

[2Arribada : arrivée en masse des tortues (en espagnol)