Rosalia alpina (Linnaeus 1758)

Rosalie des Alpes

Rosalia alpina est sans doute le plus beau longicorne (Cerambycidae) de France. Sa livrée d’un gris bleuté, marquée de taches noires sur les élytres, n’est peut-être pas la plus brillante, mais elle est à coup sûr la plus élégante, avec ses antennes annelées de bleu et de noir et pourvues de touffes de poils noirs à la base des premiers articles. Elle est grande (entre 20 et 40 mm), et caractérisée par un dimorphisme sexuel qui permet de différencier facilement les femelles des mâles : ce dernier a les antennes nettement plus longues que le corps, assez fines, et le bord externe de ses mandibules est doté d’une forte dent. Les mandibules de la femelle sont normales et ses antennes sont à peu près de la longueur du corps. La femelle est, comme souvent chez les insectes, un peu plus grande que le mâle. Comme les empreintes digitales chez les humains, la forme des taches noires sur les élytres est propre à chaque individu.

C’est en explorant un boisement peu fréquenté de la commune de Saint Clément-des-Baleines que je suis tombé, incrédule, fin juin 2021, sur un beau mâle qui grimpait sur une grosse branche morte de peuplier noir.
Incrédule, pas tout à fait : quelques années auparavant, à 1,5 km de là, j’avais en effet trouvé une antenne de Rosalia fichée dans un pieux de clôture, seule trace visible d’une prédation probablement par un oiseau.
Ce n’est pas la première fois que R. alpina est vue dans l’île de Ré. Un autre site est connu dans la partie sud de l’île. Mais c’est sans doute la première fois qu’elle est observée sur peuplier noir, car jusqu’ici sa larve était surtout connue pour se développer dans d’autres essences feuillues : hêtre en montagne, saule ou frêne dans la partie de climat atlantique de son aire de répartition, qui va de l’Espagne à l’ouest au Caucase et à la Russie (Samara, Oufa) à l’est.

D’autres essences sont citées, mais pas le peuplier noir. Il s’agirait donc là d’une adaptation de cette espèce à un site dépourvu d’arbres morts ou sénescents susceptibles de lui convenir, bien que des frênes soient présents.
Le cycle de développement de la Rosalie se déroule sur 2 ou 3 ans. La larve se nourrit de bois mort. L’adulte, qui ne vit pas très longtemps (2 ou 3 semaines) consommerait de la sève fermentée.
Bien qu’elle ne soit pas rare en France, c’est une espèce protégée, sans doute du fait de sa beauté qui en a fait un insecte convoité par les collectionneurs. C’est une espèce protégée aussi au niveau européen, à la fois par la Convention de Berne relative à la protection de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe et par la Directive Habitat Faune Flore de l’UE qui la classe en annexe II (protection de ses habitats) et en annexe IV (protection stricte des spécimens).
Elle est classée vulnérable dans les listes rouges de l’UICN, aussi bien au niveau français que mondial.